UN PEU de souvenirs « intérioristes » lors de la cent deuxième des MILLE et UNE TERRASSE, à l’occasion du livre de Marine Debilly « Après Dieu, l’idiot ». A quinze heures passées de vingt-deux minutes, Marine Debilly et Mauricio Amarante franchissaient le pas de la porte du Centre de beauté Culturelle et au terme d’un long voyage de quarante-huit heures entre Marseille et Bruxelles. En effet, la veille, un million de manifestants grévistes s’étaient rassemblés à Paris, immobilisant tout le pays et reportant le départ du train par lequel le duo comptait rejoindre Bruxelles. Alors après un bref message sur internet, Marine Debilly et Matthieu Ha priaient Dieu de telle sorte que la seconde réservation des billets du train fût la bonne. Et Dieu réalisait leurs vœux aussitôt. Pourtant, après un bon thé de la Paix du quartier, préparé par Yacine, les deux artistes n’étaient toujours pas en mesure de savoir si les livres allaient arriver dans les temps ou pas du tout. La maison d’édition Mot/lame est une nébuleuse dans le monde opaque de la littérature alternative bruxelloise. Nathaniel Molamba, jeune éditeur et très énigmatique personnage, n’avait donné aucun signe de communication à ses collaborateurs ces derniers jours. Finalement celui-ci fera son apparition calmement dans la terrasse sous terraine, un peu avant dix-huit heures. Il demandait à pouvoir relier les dizaines de livres de Marine Debilly. Matthieu Ha lui proposait la plate-forme du monte-charge bleu et sur laquelle une table basse avait été installée. A l’aide d’un couteau en ébène, l’éditeur s’est mis à l’ouvrage en pliant plus de cent cinquante pages. Il les agrafait soigneusement avec une étonnante couverture dont les trois couleurs horizontales : un bleu céleste et un rouge matinale, séparés par des espace brumeux ou blanc écarlate. La tricolorimétrie apparaissait aussi fine et puissante que la vitesse de la lumière. C’était très réussi et fort surprenant. Cayo était absente, elle avait demandé l’aimable assistance de Clément Delhomme et Manon Laigle à la buvette sportive. Plus d’une trentaine de personnes étaient venues assister à cette soirée de sortie du livre. A cette occasion Marine Debilly avait invité l’écrivain Antoine Boute pour ouvrir la soirée. Auteur de la conscience BIOHARDCORE depuis bientôt une décade, le professeur invitait le public dans une séance d’hypnose au cours de laquelle sa voix guidait avec précaution son auditoire dans une pénétration liquide à l’intérieur de leur corps. Involontairement, parfois, certains passages de ses descriptions résonnaient avec certains des tableaux d’Ignacio Galilea. Les coïncidences rendaient ce début de soirée, inhabituellement beau. Dans la terrasse sous terraine Marine Debilly lisait les textes de son livre dans le noir, accompagnée très habilement par l’argentin Mauricio Amarante. Il était sur le piano angélique. Il jouait à l’économie et précisément. Il faisait la transcription de chaque virgule du livre par un point sonore de ses doigts. Sous le pétale d’or BEAUCOUP, Florence Cats modulait les ondes invisibles de son thérémine avec ses mains. Chacun de ses glissendos monophoniques était une ficelle dans le néant. Etrangement, les visages des deux anges sur le piano, étaient celui que portait l’écrivaine dans le noir. Mais plus mystérieusement encore, après que Mattheu Ha vînt à prendre l’écrivaine en photo, ce dernier découvrait avec stupeur une tête monstrueuse qui venait défigurer durant une fraction de seconde, le visage marial de la jeune femme … La soirée allait être reliée invariablement par ces effets de perspectives flottantes et dont les aiguilles de l’horloge n’arrivaient plus à contrôler le temps. Finalement, un peu après minuit, dans le vent glacé, le drapeau d’or finissait par se déchirer en deux et clôturait ainsi la cent deuxième des MILLE et UNE TERRASSE.
top of page
bottom of page
Comments